Le réseau des agriculteurs et agricultrices Bio
de Provence-Alpes-Côte d'Azur

Témoignage : Brigitte Pavaut, CROUS Aix-Marseille

« Nous avons fait le choix d’améliorer la qualité de la restauration de manière visible en proposant des produits biologiques simples »

Brigitte Pavaut, diététicienne conseil auprès du service de restauration du Crous Aix-Marseille qui assure la prestation de douze restaurants universitaires.


On évoque souvent l’introduction de produits biologiques en restauration scolaire, très rarement en restauration universitaire. Comment avez-vous procédé ?

Nous avons commencé à introduire des produits biologiques en 2005 dans le cadre du Programme National Nutrition Santé (PNNS). Nous avons débuté par des buffets découvertes au cours desquels je faisais venir des acteurs et des fournisseurs de produits biologiques. C’est une bonne entrée en matière avec le sujet, une façon de se familiariser avec les produits et de les goûter bien sûr ! Puis nous sommes passés aux Jeudis Bio dans un, puis deux, puis trois restaurants universitaires (RU). En 2008, suite à des formations réalisées par Un plus bio, tous les RU avaient leur Jeudi Bio ! Et ultime étape, en décembre 2011, nous avions du bio tous les jours. Avec au menu, du pain bio demi-complet au levain naturel en tranches, deux crudités bio de saison et locales, un fruit bio de saison et local, des yaourts bio nature sans sucre, et une table d’assaisonnements avec du sucre complet bio, du gomasio*, de la levure maltée, du vinaigre balsamique, de l’huile d’olive et de colza.

Cette démarche est-elle bien passée auprès de votre public d’étudiants ?

Quand nous avons mis le « tout bio », cela n’a pas fonctionné. Les étudiants sont de jeunes adultes, ils souhaitent avoir le choix et acceptent mal qu’on leur impose les choses. Ils ont aussi des habitudes alimentaires et aiment retrouver certains aliments. Ma priorité était vraiment d’axer sur des produits bio simples et de qualité, bons pour la santé comme les carottes, les betteraves, les choux et tous les légumes racines qui sont très perméables aux pesticides. Et aussi des fruits avec des kiwis, des pommes et des clémentines de Corse mais pas des frites bio ni de la mousse au chocolat bio ! Il est important d’avancer dans la démarche par étape. J’ai eu la chance de pouvoir réaliser sept à huit animations (pain, crudités, produits laitiers…) par RU pendant dix ans. Cela permet de découvrir, de faire goûter et d’impliquer lesétudiants qui sont plutôt curieux et ouverts. Et j’ai toujours été soutenu par la direction de la restauration pour mettre en place de nouvelles initiatives.

Quelles difficultés avez-vous rencontré ?

En 2005, c’était une démarche nouvelle et nous étions assez précurseurs. Ce n’était donc pas simple à mettre en place. La grande difficulté est de devoir gérer le renouvellement des marchés publics. Il faut donc trouver des personnes capables de répondre aux critères, c’est-à-dire en capacité de produire et de livrer, dans notre cas 12 000 repas quotidiens. Par exemple, pour le pain qui dispose d’un marché dédié, j’ai beaucoup démarché moi-même pour trouver du pain bio de qualité. Le pain bio demi- complet en farine T 80 passe mal chez les étudiants. Sur les différents RU, il y avait beaucoup de gaspillage. Aujourd’hui nous avons à Marseille du pain bio en farine T 65 sous forme de petits pains, et des petits pains locaux non bio, à Aix-en-Provence et Avignon. Je le regrette car cela est moins intéressant sur le plan nutritionnel.

Vous pointez la question du gaspillage alimentaire, avez-vous mené des actions spécifiques dans ce domaine ?

Oui tout à fait. Nous avons fait très attention aux grammages servis et à la formation du personnel. Ces derniers ont été sensibilisés à une réduction des grammages en viande à associer à un apport supplémentaire de légumes secs. Il faut apprendre à être à l’écoute de la demande de l’étudiant, certains mangent plus que d’autres. C’est important de pouvoir le prendre en compte afin de réduire le gaspillage alimentaire.

Quels conseils donneriez-vous avant de se lancer dans le bio ?

Il faut beaucoup de persévérance et d’écoute. J’ai toujours travaillé en lien avec les équipes de cuisine en dialoguant, en échangeant, en montrant, en impliquant. Les étudiants, c’est la même chose. Ils apprennent à composer eux-mêmes un menu équilibré, de manière autonome.


Propos recueillis par Isabel Soubelet - www.repasbio.org