Protéger les messicoles sur son exploitation, une ambition agro-écologique
Les plantes messicoles, ou habitantes des moissons, souvent perçues comme adventices, sont en réalité généralement peu concurrentielles des céréales et capables d’offrir de nombreux services agronomiques. Fortement menacées par l’utilisation des herbicides, un plan de relance au niveau national a été lancé dont le réseau Bio de Provence Alpes Côte d’Azur et le Conservatoire Botanique National Alpin se font les relais régionalement.
Nielle des blés, coquelicot, bleuet, vachère, caméline, mâche… leurs noms ne vous sont sans doute pas inconnus et leurs fleurs encore moins si vous produisez des céréales d’hiver sur votre exploitation. On les appelle les messicoles, c’est-à-dire les plantes compagnes des moissons, du fait de leur inféodation aux céréales qu’elles accompagnent. Leur histoire apparaît indissociable de l’agriculture depuis sa naissance puisque leurs premières traces ont été repérées 8000 ans avant Jésus Christ. Ce sont pour l’essentiel des plantes annuelles qui germent dans les mêmes conditions que les céréales pour fleurir au début de l’été. Bien que classées dans la grande catégorie des adventices, les messicoles sont généralement peu concurrentielles et leur présence –raisonnable- dans les champs a un impact quasi-nulle sur les rendements. On pourra alors leur préférer le terme de plantes compagnes, tant les services écosystémiques dont elles sont capables sont nombreux.
Un intérêt agro-écologique remarquable
D’abord elles font office de gîte et de couverts pour les insectes et en ce sens participent indirectement à la pollinisation des plantes cultivées. Leur floraison, souvent étalée dans le temps, est de ce point de vue primordial. Par ailleurs, elles contribuent au maintien d’une diversité végétale dans les cultures qui peut être un plus pour y abriter des auxiliaires comme pourrait le faire une bande enherbée ou une haie. De plus, la variété importante des familles botaniques constituant les plantes messicoles, est susceptible d’offrir une large palette d’utilisations possibles. Dans la famille des messicoles, on distingue en vrac : l’ers légumineuse remise en culture aujourd’hui bien connue des producteurs du Plateau de Valensole, la mâche, plante de cueillette remise en culture au XVII ème siècle, la cameline…
Au-delà de leur présence dans les blés, leur multiplication en pure, sur la base d’observations de flores messicoles spontanées, en pure pourrait donc présenter de nombreux avantages pour trouver par exemple des cultures, des engrais verts ou des fourrages adaptés aux conditions méditerranéennes si particulières et si exigeantes. Des expérimentations en ce sens sont actuellement menées à Revest du Bion (04), à St Etienne du Grès (13) et au lycée d’Aix en Provence dans le cadre du CASDAR « Mobilisation collective pour l’Agroécologie » porté par Bio de PACA et d’un programme financé par la fondation Occitane porté par le CBNA pour préfigurer la mise en place de filières rémunératrices pour les producteurs dont les débouchés pour les espaces verts ou le fleurissement des autoroutes ne demandent qu’à être développés.
Bourdon et pied d’alouette
L’identification de pratiques favorables dans les exploitations
Avant de les multiplier, l’enjeu est dans un premier temps de les préserver. Pour cela des pratiques agricoles favorables ont été identifiées, en premier lieu desquelles la diminution, voire la suppression, des herbicides. En ce sens, les modes de production biologique sont particulièrement favorables aux messicoles, avec en plus généralement des seuils de tolérance aux « adventices » des agriculteurs plus élevés qu’en agriculture non bio. La réalisation d’un labour augmente également le nombre de messicoles observé dans les champs, tout comme le travail superficiel sans retournement (griffage). La période de labour doit être strictement réalisée à l’automne pour être en adéquation avec leur cycle biologique qui correspond d’ailleurs à celui des céréales d’hiver. Enfin l’utilisation très modérée d’azote organique n’est pas défavorable aux messicoles. Plus que des pratiques isolées, ce sont en réalité des combinaisons de pratiques qui sont favorables au maintien de la diversité des messicoles. En ce sens, les pratiques en bio sont un atout de ce point de vue. En raisonnant leurs pratiques en fonction de leurs objectifs économiques et agronomiques, les agriculteurs sont donc parmi les premiers acteurs de conservation des messicoles.
Mathieu Marguerie, Agribio 04
Relecture :
Didier Jammes, Bio de PACA
Stéphanie Huc, CBN Alpin
Agribio 04
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