Portrait d’agriculteur.ice.s : Julia Bernabei
Découvrez nos agriculteurices et leurs parcours ! Rencontrez à travers un court reportage le quotidien et les convictions des producteurices en bio dans le Vaucluse.
Temps de lecture : 4 minutes
Témoignage récolté (lors d’une interview) le 1er Juillet 2025.
Portrait d’agricultrice bio : Une ferme bio entre convictions, résilience et transmission

Au Thor, dans le Vaucluse, Carole Sanchez-Bernabei et sa fille Julia élèvent des volailles en agriculture biologique avec passion et détermination. Voici le portrait d’un duo engagé, soutenu par les réseaux paysans.
Depuis plus de vingt ans, Carole élève des volailles bio. À ses côtés, Julia, sa fille, salariée depuis 2018 sur l’exploitation, incarne la continuité et l’adaptation d’une ferme qui a toujours cherché à rester fidèle à ses valeurs tout en innovant. Ensemble, elles valorisent une production locale, maîtrisée de bout en bout, sur une ferme où chaque décision compte.
De la reprise familiale à la conversion au bio
L’histoire commence à L’Isle-sur-la-Sorgue, sur la ferme conventionnelle du grand-père de Julia. Carole choisit de déménager et de convertir l’exploitation au bio : « Le sol était trop pollué, c’était inenvisageable d’y faire pousser quoi que ce soit. » Alors, fini la monoculture et ses dettes. En 2003, elle opte pour la volaille, convaincue par les atouts de l’agriculture biologique.
Une ferme en constante évolution
En 2017, Carole investit seule dans une salle d’abattage.
Puis en 2020, elle et Julia ajoutent un laboratoire de transformation. Julia, diplômée d’un CAP boucherie, y découpe les poulets et valorise tous les morceaux. Zéro déchet, circuits courts et autonomie sont les piliers de leur fonctionnement.
Carole et Julia ont commencé un travail sur l’autonomisation de la ferme à travers l’alimentation avec leur participation à des essais d’implantation de couverts dans les parcours, ainsi que sur le développement de la fabrication à la ferme de l’aliment (production et transformation).
Le soutien des réseaux bio
Adhérentes de longue date à Agribio 84 et à l’ADEAR 84, Carole et Julia s’appuient sur ces structures pour accéder à des informations précieuses : aides comme le fond Avenir Bio, accompagnement sur le Pacte haies, formation en agroforesterie, ou encore conseils en législation. « Sans eux, on passerait à côté de beaucoup de choses. Agribio 84, c’est une épaule. »
Carole a fait partie d’un GIEE animé par Agribio 84 sur les volailles : “Vers une autonomie des exploitations et une maîtrise des intrants en élevage de volailles biologiques”. Ce GIEE lui a permis de travailler avec d’autres éleveuses sur plusieurs points, dont la maîtrise des coûts de production par la fabrication à la ferme de l’aliment. L’autoproduction des céréales et protéagineux et la fabrication de l’aliment à la ferme sont des éléments essentiels pour travailler sur l’autonomie des élevages de volaille. Plusieurs autres sujets ont également été abordés : l’amélioration des pratiques avec la recherche de races de volailles adaptées au territoire, travail sur la reproduction, l’implantation d’arbres et de couverts dans les parcours, la valorisation des sous-produits. La communication a aussi été un point important du GIEE, pour mettre en valeur le travail effectué par les éleveuses du GIEE envers les autres élevages ainsi que pour la clientèle.
Julia est aujourd’hui au conseil d’administration d’Agribio 84 depuis l’assemblée générale 2025. Elle veut rendre visible l’exploitation, défendre la bio, et soutenir l’idée d’une conseillère dédiée à l’élevage.
Résilience, vente directe et avenir
La crise du COVID-19 et l’arrêt des marchés ont poussé mère et fille à développer la vente directe. Le point de vente à la ferme représente aujourd’hui 27 % de leur chiffre d’affaires. « Les gens veulent manger local, avoir un impact positif. »
Mais les défis restent nombreux. La chaleur extrême menace les volailles, qui ne transpirent pas. Planter des arbres devient une urgence. Les aides existent, mais les démarches sont longues et complexes. De plus, certaines aides du Pacte Haie sont redirigées vers d’autres domaines.
Les financements qui étaient réservés au Pacte Haie pour les plantations 2025-2026 ont été fortement réduits, pour les orienter vers des secteurs agricoles considérés comme en difficulté. Agribio 84 a choisi d’orienter les agriculteuri.ce.s qui souhaitent planter avec le pacte haie vers un autre financement : des enfants et des arbres (=DEEDA). C’est un financement privé géré par une association qui récolte des fonds auprès d’entreprises de tous les secteurs, et les utilise pour financer des plantations de haies chez des agriculteur.ice.s, à condition que des enfants participent à la plantation. Le but, c’est de planter des haies, et de permettre à des enfants de connaître un peu le milieu agricole.
Une bio de convictions
Pour Carole, le choix du bio était une évidence. Pour Julia, c’est aussi un choix d’avenir : « La bio devient nécessaire au vu des bons en arrière qu’on observe. » La clientèle fidèle – retraités, jeunes couples – valorise la qualité. « On mange moins de viande, mais mieux. »
Julia veut aussi envoyer un message clair aux futurs paysans : « Il ne faut pas avoir peur de se lancer. En bio et en vente directe, il y a de quoi faire. On valorise mieux nos produits, et surtout, on est libres. »
Être femme dans un métier d’hommes
Carole et Julia ont également dû faire face à des stéréotypes sexistes, encore tenaces. « Quand je vais au garage, on me parle comme si je n’y connaissais rien, comme si j’étais incapable de comprendre. » Julia, elle, se heurte à un manque de légitimité sur les marchés : « Certains clients ne me croient pas quand je leur parle de mon travail. On me prend pour une vendeuse, pas pour une éleveuse. » Les remarques condescendantes, les salaires sous-évalués en boucherie, et le manque de reconnaissance sont des réalités qu’elles dénoncent, même si elles notent une solidarité féminine croissante dans le milieu agricole.
Agribio 84 : un soutien structurant pour la ferme et pour Julia
Depuis plusieurs années, Carole et Julia s’appuient sur Agribio 84 pour faire avancer leur ferme dans le sens de l’autonomie, de la résilience et du collectif. « C’est une épaule, un relais précieux d’infos, de formations, d’aides qu’on n’aurait pas trouvées seules », souligne Julia. Grâce à son implication dans le GIEE volaille animé par l’association, la ferme a pu progresser sur la maîtrise de ses coûts de production, la fabrication d’aliments à la ferme, et l’agroforesterie.
En 2025, Julia rejoint le conseil d’administration d’Agribio 84. Elle y défend la place de l’élevage bio dans le département et soutient l’idée d’une conseillère technique dédiée à l’élevage. Elle encourage d’autres paysans et paysannes à s’impliquer dans les réseaux : « C’est en étant visibles, en partageant nos expériences qu’on fera avancer la bio. »
Contact des Volailles de Carole : 06.10.08.53 - 06.33.68.45.44
carole.sanchez84@yahoo.fr
Rédaction et réponses récoltées par Perrine Hoffman, apprentie en communication d’Agribio84.

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