Activateurs de sol : résultats d’essais en céréales biologiques en PACA
Par Mathieu Marguerie
mathieu.marguerie@bio-provence.org
L’utilisation des activateurs de sol se développe, en agriculture biologique comme en agriculture conventionnelle. Pour y tenter d’y voir plus clair, Agribio 04 a suivi un essai sur la question chez un agriculteur à Mane.
Ayant pour objectif d’améliorer le fonctionnement du sol, de la plante ou même des interactions sols-plantes, les activateurs de sols et les biostimulants sont de plus en plus nombreux à être mis sur le marché. Engrais, amendements minéraux basiques, amendements organiques ou matières fertilisantes, tous visent une amélioration du fonctionnement biologique des sols à moyens termes. Afin de mesurer leur efficacité, et sur proposition d’un agriculteur, Agribio 04 a analysé une parcelle expérimentale située à Mane ayant reçu l’application de Bactériosol ®, sur la moitié de sa surface durant quatre années. Ce produit, commercialisé par la société Sobac est « composé d’une sélection de végétaux naturels compostés » et « transforme rapidement toutes les matières organiques en humus » d’après la page internet le présentant. Il est en outre précisé que « Bactériosol remplace de façon naturelle toutes fumures de fond, amendements calciques ou organiques, et permet de diminuer, voire de supprimer l’apport d’azote minéral. »
Suivi de l’effet au bout de quatre années
L’essai a été mené dans une parcelle argilo-calcaire de 130 mm de réserve utile menée en non-labour en agriculture biologique sur la commune de Mane (04). Depuis 2013, l’agriculteur a appliqué du Bactériosol® à raison de 300 kg par ha et par an sur la moitié de la parcelle, sans complément de fertilisation. Sur l’autre moitié de la parcelle, il a mené ses cultures selon sa conduite classique, avec des fertilisants organiques usuelles, mais sans activateur de sol. En 2013, avait été implantée une sauge sclarée, remplacée par un blé tendre en 2015. Le suivi expérimental d’Agribio a quant à lui porter sur la quatrième année d’essai, à savoir une deuxième paille de blé tendre (variété Arezzo) implantée à l’automne 2016. Pour cette dernière année, une fertilisation de 300 kg/ha de 9-4-1 avait été appliquée en février, soit au moment du tallage du blé dans la modalité « conduite classique », sans activateur de sol. Au même moment, 300 kg/ha de Bactériosol ont été épandus dans l’autre moitié de la parcelle, sans complément de fertilisation organique. Les mesures sur les performances du blé l’ont donc été au bout de quatre années, excluant ainsi une vision restreinte sur un temps trop court pour constater quelconque effet des diverses pratiques. Ont ainsi été mesurées l’ensemble des composantes de rendement du blé récolté en 2017, mais également la structure du sol par des fosses pédologiques réalisées fin mars.
Figure 1 : plan de l’essai
La présence de Bactériosol ne compense pas l’absence de fertilisation organique
Les profils de sol ont révélé une densité racinaire significativement plus importante en présence de Bactériosol®, par rapport au témoin en conduite classique. Etant donné que l’intégralité de la parcelle a été conduite de la même manière sur les quatre années d’expérimentation (interventions culturales et assolement identiques), on peut donc supposer un impact positif sur la structure du sol ou le développement racinaire du au Bactériosol ®. Concernant le rendement à la récolte, la présence de Bactériosol® n’a pas compensé l’absence de fertilisation organique. La modalité conduite avec fertilisation mais sans activateur de sol a en effet réalisé un rendement supérieur de 8 quintaux par hectare. Dans le détail des composantes de rendement, c’est essentiellement le nombre d’épis/m² qui a été affecté par l’absence de fertilisants, que la seule présence de l’activateur de sol n’a pas suffi à compenser (Figure 2). Une biomasse plus faible à floraison dans la modalité Bactériosol (4.8 T de matière sèche /ha contre 6.3 en présence de fertilisant organique) dénote une plus faible nutrition azotée du blé. Avec l’unique épandage du Bactériosol ®, le blé n’avait absorbé à floraison que 34 kg d’N/ha contre 42 en conduite classique. Si le Bactériosol a donc permis une meilleure densité racinaire du blé, cela n’a pas été profitable dans des conditions marquées de carence en azote (pas de précédent légumineuse depuis 4 années). Il a donc manqué une fourniture azotée facilement disponible aux racines plus denses dans la modalité Bactériosol pour obtenir les mêmes résultats qu’en conduite classique de fertilisation.
Figure 2 : impact de la substitution de l’engrais azoté par du Bactériosol® sur les composantes de rendement du blé tendre.
Des essais à poursuivre et à comparer
Dans le cadre de cet essai, il a donc très certainement manqué une modalité permettant de déterminer le niveau de fertilisation à apporter en complément de l’activateur de sol. Ce complément de fertilisation aurait sans doute permis au blé de mieux profiter de sa meilleure exploration racinaire. Reste qu’économiquement, les apports combinés de fertilisants et d’activateurs de sols posent question sur des potentiels moyens de rendement compris entre 25 et 35 quintaux par ha. Les résultats mis en avant dans cet essai confirment ceux obtenus au niveau national par Arvalis montrant que la substitution de toute ou partie de fertilisation par les activateurs de sols entraine des pertes de rendement comprises entre 5 et 10% (Perspectives Agricoles Mars 2018). Les effets sur le potentiel de minéralisation des sols et la biomasse microbienne sont également peu visibles d’après la même étude. La stratégie d’apport d’activateurs de sol doit donc être raisonnée en fonction de la structure initiale des sols et des sources possibles d’amendements organiques de types composts disponibles à coûts modérés aux alentours de la ferme. L’optimisation de la couverture du sol et la modération du labour sont également autant de leviers qui ont fait leurs preuves pour permettre une bonne structure racinaire, en complément d’azote disponible pour les cultures.
Pour aller plus loin
Chambre d’Agriculture 04, janvier 2018 : "Agronomie : Stimulateurs de défense des plantes, activateurs de sol, biostimulants : des résultats incertains"
Perspectives Agricoles, avril 2018 : Activateurs de la vie biologique des sols : des résultats peu probants
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